Le changement climatique, phénomène avéré et accéléré, représente une menace existentielle pour notre planète. Les impacts sont multiformes : hausse des températures moyennes (+1.1°C par rapport à l'ère préindustrielle selon le GIEC), événements climatiques extrêmes plus fréquents et intenses (canicules, inondations, sécheresses), élévation du niveau de la mer, perte de biodiversité, et conséquences socio-économiques majeures. Face à cette urgence, le droit environnemental se positionne comme un instrument clé, mais non exhaustif, pour atténuer ses effets et s'adapter à ses conséquences inéluctables.

Le droit environnemental, initialement centré sur la gestion des pollutions locales, a évolué vers une approche globale intégrant les problématiques climatiques. Son évolution reflète une prise de conscience progressive de l'interdépendance des enjeux environnementaux et de la nécessité d'une action concertée à l'échelle internationale et nationale.

Atténuation du changement climatique par le droit environnemental

L’atténuation vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) responsables du réchauffement climatique. Le droit environnemental agit à plusieurs niveaux pour atteindre cet objectif ambitieux.

Le droit international environnemental et la lutte contre les GES

L'Accord de Paris (COP21, 2015) représente un tournant majeur. Il engage les pays signataires à limiter le réchauffement climatique bien en dessous de 2°C par rapport à l'ère préindustrielle, en visant 1,5°C. L'accord repose sur des contributions déterminées au niveau national (CDN), des mécanismes de transparence et de suivi des engagements, et des marchés carbone pour stimuler la réduction des émissions. Malgré son importance, l'accord peine à atteindre ses objectifs faute d’une ambition suffisante de certains États et de difficultés de mise en œuvre des engagements. En 2022, les émissions mondiales de CO2 ont atteint un niveau record de 36,6 milliards de tonnes.

  • Le Protocole de Kyoto (1997) : Précédant l’Accord de Paris, ce protocole a posé les bases de la coopération internationale sur le climat, introduisant des mécanismes de réduction des émissions.
  • Le Marché Carbone Européen (EU ETS) : Un système d’échange de quotas d’émissions mis en place par l’Union Européenne visant à limiter les émissions des entreprises.

Le droit national et régional : politiques d’atténuation

Les États mettent en œuvre des politiques d’atténuation diversifiées. Parmi elles, les taxes carbone, qui visent à internaliser le coût environnemental des émissions de GES, sont de plus en plus répandues. D'autres instruments réglementaires concernent les normes d'émission pour les véhicules (normes Euro), les bâtiments (réglementation thermique), et les industries (limites d'émissions polluantes). La France, par exemple, a mis en place une taxe carbone progressivement augmentée, tandis que la Norvège, pionnière en matière de véhicules électriques, encourage l'adoption de véhicules propres par des incitations fiscales. En 2023, la France a réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 2,7% par rapport à 2022.

Le droit de l’énergie et la transition énergétique

La transition énergétique, impliquant un déplacement des énergies fossiles vers les énergies renouvelables, est fondamentale. Le droit joue un rôle crucial en réglementant la production, le transport et la consommation d’énergie. Il favorise le développement des énergies renouvelables (solaire, éolien, géothermie, hydroélectricité) via des subventions, des appels d’offres, et des quotas d'énergies renouvelables (Obligations d'achat). Il encadre l’exploitation des énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) par des permis d’exploitation et des réglementations pour réduire leurs émissions. L'Allemagne a opté pour une sortie progressive du nucléaire, tandis que la France maintient un parc nucléaire important. Ces choix ont des implications juridiques et environnementales très différentes. Les investissements dans les énergies renouvelables dans le monde ont atteint 495 milliards de dollars en 2022.

  • La Loi énergie-climat en France : Un exemple de législation nationale visant à atteindre des objectifs de réduction des émissions de GES.
  • Les plans nationaux énergie-climat (PNEC) de l'UE : Cadre de planification pour la transition énergétique au sein de l'UE.

L’adaptation au changement climatique par le droit

L'adaptation vise à réduire la vulnérabilité des sociétés et des écosystèmes aux impacts du changement climatique. Le droit est un outil essentiel pour planifier et mettre en œuvre des mesures d'adaptation efficaces.

Gestion des risques et prévention des catastrophes naturelles

Face à l’augmentation des événements extrêmes (inondations, sécheresses, canicules, tempêtes), des réglementations sont nécessaires pour gérer les risques, protéger les populations et les infrastructures. Le droit de l'urbanisme, par exemple, peut encadrer la construction dans les zones à risques. Les plans de prévention des risques naturels (PPRN) identifient les zones exposées et définissent des mesures de prévention et de protection. La gestion des ressources en eau, face à la raréfaction, est également un enjeu majeur avec des règles sur l’usage de l’eau et le recyclage. En 2022, les pertes économiques liées aux catastrophes naturelles ont dépassé 300 milliards de dollars.

Protection de la biodiversité et des écosystèmes

Le changement climatique menace la biodiversité et les écosystèmes. Le droit de la biodiversité, incluant la protection des espèces menacées et la création d'aires protégées, est fondamental pour préserver les écosystèmes face aux pressions climatiques. La préservation des forêts, puits de carbone majeurs, est cruciale pour limiter le réchauffement climatique. La gestion des espaces naturels, la restauration des écosystèmes dégradés, et la mise en place de corridors écologiques sont autant d'actions essentielles, soutenues par le droit.

Droit de la santé publique

Les impacts sanitaires du changement climatique (canicules, maladies vectorielles, malnutrition) nécessitent une réponse du droit de la santé publique. Des mesures de prévention des risques sanitaires liés à la chaleur, des stratégies de lutte contre les maladies vectorielles, et des programmes d’alimentation et de nutrition sont nécessaires. La surveillance épidémiologique et la gestion des crises sanitaires doivent être renforcées afin de répondre efficacement aux nouvelles menaces sanitaires liées au changement climatique.

Les limites et les défis du droit environnemental

Malgré son importance, le droit environnemental fait face à des limitations et des défis importants.

Difficultés de mise en œuvre et d'efficacité

Le manque de coordination entre les différents niveaux de gouvernance (international, national, régional), les difficultés de mise en œuvre des réglementations, le manque de moyens, et les pressions économiques peuvent limiter l’efficacité des instruments juridiques. Le faible niveau d’ambition de certains États dans la réduction des émissions de GES et le manque de contrôles efficaces illustrent ces difficultés.

Défis pour l'avenir

Pour relever le défi climatique, une législation plus ambitieuse et plus intégrée est indispensable. Il faut renforcer les mécanismes de contrôle et de sanction, améliorer la coopération internationale, et intégrer les aspects sociaux et économiques dans les politiques climatiques pour assurer une transition juste et équitable. La question de la responsabilité des entreprises et la lutte contre le "greenwashing" constituent des défis juridiques majeurs, notamment concernant l'obligation de rendre compte (reporting) et les actions en justice contre les entreprises contribuant au changement climatique.

Le droit environnemental est un outil essentiel pour lutter contre le changement climatique, mais il doit évoluer et être renforcé pour répondre à l'urgence de la situation. Une action concertée et une ambition collective sont nécessaires pour garantir un avenir durable pour la planète.